Saphirs de Madagascar : pierres de cauchemar
Située dans l’océan Indien, Madagascar est une île aux sous-sols pleins de promesses. En effet, les souterrains de cette île sont riches en gemmes de couleurs, aujourd’hui très prisées dans le monde de la joaillerie. Depuis la fin des années 90, des saphirs d’une grande qualité sortent de ces mines « artisanales » pour la plupart et attisent les convoitises. Mais qu’en est-il du bien-être des mineurs, souvent des enfants, qui s’acharnent à chercher ces pierres précieuses ?
Les conditions humaines sont absolument désastreuses, comme le démontre la journaliste d’investigation Julie Zaugg dans son article pour Public Eye en janvier 2024. De jeunes enfants, le ventre gonflé par la dysenterie, courent les rues des villes minières aux airs de Far-West, sorties de terre rapidement et qui ne bénéficient en général même pas de latrines. Leurs frères et sœurs, à peine plus âgés, aident leurs parents dans les nombreux trous afin d’extraire ces pierres tant convoitées. Le risque d’effondrement pour ces mines artisanales existe bel et bien mais la nécessité de survivre est plus forte.
Une fois que les précieux cailloux bruts sont trouvés, il s’agit encore d’en recevoir un bon prix face à des acheteurs aux dents longues. Le profit pour ces acheteurs est souvent au minimum de 400% à la revente et les mineurs n’en tirent qu’une toute petite valeur, qu’ils sont souvent obligés d’accepter. Ce pourcentage est à remettre en question et dans le contexte de nombreux intermédiaires, gonflant à chaque fois le prix de la pierre. Le client “final”, celui qui vient acheter un bijou avec un saphir en bijouterie, se voit alors facturer un prix qui est de très loin supérieur à celui auquel il a été acheté au mineur. Notons aussi que le salaire mensuel moyen à Madagascar est de 43$ selon BDEEX, ce qui est très bas. Vient ensuite la longue procédure d’exportation légale… ou pas. Les nombreux pots-de-vin et la corruptibilité de certains douaniers ont permis la malheureuse apparition de faux certificats d’exportation, dans un pays que de récentes statistiques positionnent comme l’un des plus corrompu au monde (145ème sur 180 selon le Corruption Perceptions Index par Transparency International, la 180ème place étant occupée par le pays connaissant le plus de corruption).
Ces saphirs, après avoir été taillés en Asie pour la plupart, arrivent en partie sur le territoire suisse, dans les grandes enseignes. Il n’est donc pas rare d’acheter un saphir avec un faux certificat d’exportation ayant participé à ce marché odieux : mineurs gagnant le strict minimum pour de longues journées dans des failles dangereuses, ventres affamés et exploitation sans contrôle de ces mines font partie de l’histoire de ces pierres. Il est désormais impératif de faire cesser cette pratique et de se tourner vers une solution plus durable, comme les saphirs de laboratoire qui représentent une excellente alternative. Le gouvernement doit renoncer à ces procédés et trouver des réponses pérennes à ces problèmes au plus vite. Nous pouvons aussi nous questionner sur les conditions de vie des mineurs dans le reste du monde, qui sont aussi désastreuses de manière générale.
Le monde de la joaillerie doit impérativement ouvrir les yeux face au traitement des mineurs et revoir ses pratiques, notamment en favorisant les filières de gemmes de culture. L’ouverture d’esprit est désormais de rigueur et la démocratisation des saphirs de culture par exemple, est nécessaire. Les clients quant à eux, peuvent faire un choix plus responsable en renversant la tendance d’offre et de demande, en prenant une décision éclairée lors de leur achat afin d’encourager ce nouveau marché plus éthique.
Par amour, de nombreux clients choisissent désormais des saphirs cultivés, car rien n’est meilleur que des saphirs sans empreinte négative. Ces saphirs de laboratoire possèdent la même composition chimique que ceux extraits des mines, ce qui les rend identiques, mais avec un avantage : ils n’entraînent pas la souffrance mentionnée dans cet article. Le véritable amour ne peut être symbolisé que par des gemmes qui n'ont pas contribué à ces problèmes.
AGUAdeORO est une bijouterie fondée en 2009 et présente à Genève et Zürich, offrant l’opportunité à ses clients d’acquérir des bijoux éthiques fabriqués en Suisse. Nous avons à cœur de proposer des bijoux alliant développement durable et élégance.
(Crédit Photo : © Julie Zaugg, Public Eye)